la famille est le premier refuge
Ludovine de la Rochère, présidente de la Manif pour tous, signe une tribune dans Le Figaro :
Depuis la deuxième semaine de confinement, le drame des violences familiales s’invite dans l’actualité, la prolongation du confinement et le climat anxiogène étant des facteurs aggravants. Ces situations tragiques nous mettent mal à l’aise. Comment pourrait-il en être autrement en imaginant ces violences, physiques, psychiques ou sexuelles, qui doivent être dénoncées et combattues par tous les moyens. Le malaise est en outre renforcé lorsque nous n’entendons parler des familles que sous cet angle dramatique.
Pourtant, nous ne devons pas oublier que si le confinement est possible, c’est bien grâce aux familles: le gouvernement a pu prendre la décision de fermer les crèches, écoles, collèges et lycées parce qu’il sait que les parents sont là, présents et responsables, pour l’immense majorité d’entre eux. Si la plupart des élèves suivent leurs cours via un écran, s’ils y sont assidus et s’ils font leurs devoirs, c’est bien parce que leurs parents font le nécessaire. Et si les plus jeunes parviennent à poursuivre leurs apprentissages, c’est encore grâce à leurs parents, qui ont pris le relais des maitresses d’école. C’est aussi parce que dans les foyers, l’ambiance est assez sereine pour cela.
De la même manière, si les vacances de printemps ont eu lieu, malgré le confinement, c’est parce que les parents savent occuper leurs enfants, dénicher des idées, faire d’incroyables trouvailles… Comme ils l’ont toujours fait, les parents d’aujourd’hui assument leurs rôles, se dévouent pour leurs enfants, se faisant successivement cuisiniers, infirmiers, instituteurs, partenaires de jeux, consolateurs des bobos et des chagrins et mille autres choses encore… tout en jonglant, pour beaucoup, avec leur activité professionnelle, sur le terrain ou en télétravail.
Quant aux parents d’enfants plus âgés, aux fratries adultes, aux membres de la famille élargie, le confinement a montré toute l’évidence de la solidarité pour eux. Vers qui se sont immédiatement tourné la plupart des Français? Vers leur famille: enfants, parents, grands -parents, frères et sœurs, cousins… Et à qui, pour une très large part, demande-t-on des nouvelles, envoie-t-on des informations et des blagues via Whatsapp, pour dédramatiser? À ceux de la famille qui sont confinés ailleurs.
Certes, tout n’est pas rose dans la vie de famille. Certes, les relations familiales peuvent être compliquées. Certes, ce n’est pas la volonté de chacun d’entre nous de nous retrouver contraints à passer ensemble, et dans un espace restreint, sept semaines, voire davantage. Il n’en reste pas moins que la famille est le premier refuge, le plus adapté, à taille humaine. C’est aussi un manque évident pour ceux qui en sont privés et qui affrontent plus que les autres cette crise historique dans l’isolement et la solitude.
Certains sont confinés loin de leur famille, parce qu’ils sont dans une maison de retraite ou dans une maison médicalisée. La vague d’indignation face à l’interdiction des visites a fini par l’emporter et le Président de la République a enfin permis de retrouver ce lien familial si essentiel pour les plus fragiles d’entre nous.
D’autres, souvent les jeunes adultes, se sont confinés plutôt avec des amis. C’est logique, dès lors qu’ils sont eux-mêmes complètement autonomes, sans avoir non plus à charge des enfants ou des parents âgés. Il n’en reste pas moins qu’ils savent pouvoir compter sur leur entourage familial si besoin, y compris pour les mois à venir, qui s’annoncent difficiles pour tous.
Ainsi, au lieu d’associer systématiquement la famille à des situations tragiques, il serait plus logique d’en louer l’apport en cette période si difficile. Et comme on applaudit chaque jour à 20h les soignants qui se dévouent au chevet des malades, dans des conditions si difficiles, on pourrait associer à ce rendez-vous les pères et les mères qui assument pleinement leurs responsabilités, avec toute la patience et l’énergie requises.
Loin d’être le lieu de tous les dangers, drames et violences, la famille est habituellement un refuge. Elle protège autant qu’elle rassemble et rassure tous ses membres. Nous devons retrouver dans l’espace publique une culture de la famille. Souvent malmenée par les gouvernements, la famille doit au contraire être soutenue par une politique dédiée ambitieuse. Solidarité, éducation, dignité, dépendance, qualité de vie, retraites… la famille est le cœur de la société. Notre avenir en dépend ; nous le savons tous. À l’heure où commencent à s’esquisser les contours du monde d’après, il ne faut pas l’oublier. Plus qu’une erreur, ce serait une faute, grave.